Du romain chez les gaulois :
L’Irancy Vieilles Vignes cuvée césar du domaine A.,J.-P. et S. Colinot
Irancy est un très joli village du nord de la Bourgogne, près d’Auxerre et de Chablis. Ses 200 ha de vignes forment une sorte d’amphithéâtre et l’on pourrait imaginer que les maisons du bourg forment la scène. Après s’être appelés Bourgogne Irancy, les vins ont droit depuis 1998 à l’appellation village Irancy. Il n’y a pas encore de premiers crus mais certains climats sont réputés comme le palotte situé sur une falaise qui surplombe l’Yonne en direction de Cravant, ou les Mazelots au centre de l’amphithéâtre et qui regardent le sud. Les vins sont rouges, issus généralement de pinots noirs comme à Gevrey Chambertin ou Pommard et ils sentent souvent la cerise, autre spécialité du village, un peu oubliée maintenant, les cerisiers qui contribuent au charme du lieu ayant quelque peu cédé leur place au vignoble.
L’originalité de ce village en Bourgogne est d’avoir gardé un vieux cépage, le césar, témoin de l’implantation du vignoble par les romains.
Ce cépage a d’ailleurs donné lieu à une querelle de village autour du syndicat des vignerons avec les pro et les anti césar. C’est l’INAO qui a tranché le débat en acceptant jusqu’à 10 % de ce cépage original dans la composition de l’Irancy. Il faut dire que le césar est un peu rustique comparé à la finesse du pinot noir et qu’il donne souvent de grosses grappes avec de gros raisins. Mais sur les vieilles vignes du domaine Colinot dont certaines atteignent 80 ans, sans doute les plus vieilles vignes du village, les grains sont beaucoup plus aérés et ils mûrissent mieux tout en étant moins sensibles aux maladies.
A Irancy comme ailleurs, on fait de meilleurs vins avec des raisins mûrs et la situation septentrionale doit inviter à la vigilance. Au domaine Colinot, les vendanges sont faites à la main et, depuis 2001, le truculent Jean-Pierre a laissé sa place en cuverie à la jeune Stéphanie.
Jean-Pierre Colinot et moi avons gardé le souvenir de notre première rencontre au domaine : ce fut toute une histoire qui prit, ce jour là, des allures de psychodrame et qui, avec le recul, interroge sur les vicissitudes de la transmission et de l’héritage.
Depuis, je l’ai toujours connu sur la scène avec le verbe fort et le plus souvent juste ; comme au théâtre, son texte est bien servi quelque soit le public, et tout le monde est bien reçu, chefs étoilés, ministres, grands dégustateurs ou simples citoyens.
Aujourd’hui, c’est une jeune femme qui préside au destin des vins du domaine et cultive le goût d’un cépage aussi curieux dont elle pousse les limites dans tous les sens du terme. On peut lui faire confiance pour apporter une nouvelle façon de faire dans cette partie de la Bourgogne encore trop méconnue des amateurs.
Notre dégustation :
Déjà, quand on goûte un Irancy, on ne sait pas très bien où l’on se trouve. Sommes-nous en Bourgogne ? Allons-nous vers la Loire ? La tradition veut ici que les raisins ne soient jamais éraflés ; les vins sont aussi rarement élevés en fûts…
Et puis, à quelle époque sommes-nous ? Avec le cépage césar, le vin nous rappelle ses origines. Certains disent aujourd’hui que le plus beau vestige romain c’est la vigne !
A Irancy, l’irréductible c’est le romain, autre nom du cépage césar !
Mais il est aussi possible d’y voir apparaître quelques tonneaux, invention gauloise !
Le vin a de la vigueur ! Pour Marielys, il est même baraqué… mais plaisant. Hubert évoque un mélange de douce verdeur et d’arômes fumés ; ça mûrit à l’agitation. Martial pense que tout cela va se fondre au vieillissement. Le césar apporte de la force et de la présence mais il nécessite un peu de patience. Certes, les arômes sont gorgés de cerise mais fouillons un peu…
A. J.P. S. Colinot | ||
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